mardi 23 mars 2010

Chapitre 10 – Rien ne se perd, rien ne se créé, tout se transforme

Comment renier l’indéniable chimie qui existe entres nous ? Le laboratoire de l’univers possède ses propres béchers dans lesquels reposent les élixirs qui nous composent.

Tu voudrais me perdre que tu n’y arriverais pas. Car, rien ne se perd, pas même moi. Je deviendrais autre tout simplement. Je me solidifierais, me fonderais, me vaporiserais dans tes atmosphères, sans jamais pour autant, perdre mon essence.

Sans relâche, je redeviendrais poussière, métal, papier, fleur ou carbone pour me glisser sous ton microscope. Ton œil d’aigle savant se poserait alors sur moi avec précision, découvrant, outré, la nouvelle origine de ma forme moléculaire.

Inquiet de m’y savoir encore, tu m’exposerais sans doute à milles corps étrangers afin d’altérer violemment ma composition. Tu refuserais obstinément de me reconnaître, inlassable atome niché au cœur de toute cellule.

Par dépit, tu risquerais sûrement ma vie dans une électrophorèse, mais tu constaterais, vaincu, l’inefficacité de ta procédure. L’électricité de ta beauté n’arrivant jamais à me séparer de ton amour protéinique.

Ionisée, nuclérisée, cristallisée, je n’en serais qu’indubitablement moi-même. Tétanisée, gazéifiée, raréfiée mais éternellement présente.

Laborieux rêveur, tu pourrais aussi décider de me créer tel un amalgame délicieux d’un monde stérilisé. Or, rien ne se créé, pas même moi. Comment créer ce qui existe déjà en toute pureté, en toute symbiose? Tu ne pourrais en fait que m’altérer pour mieux favoriser notre fusion.

Ivre d’explorations, tu tenterais alors de m’incorporer à une réaction en chaîne par polymérase pour mieux se voir multiplier la synchronicité de nos croisements. Tu arriverais à te persuader du génie de tes recherches, jusqu’à croire au Nobel de ma présence.

Gravissant marches par marches l’échelle de mon ADN, tu ne découvrirais pourtant que l’impossible de ma reproduction. Clonée pour mieux te plaire, je ne serai qu’une image chimérique de moi-même. Enorgueillie, embellie, ennoblie, je ne serais autre chose que la création de ce que je suis déjà.

J’aime la chimie puisqu’elle nous renvoie scientifiquement à l’essentielle. Rien ne se créé, rien ne se perd, tout se transforme. Je ne t’ai pas créé puisque tu existais déjà. Je ne t’ai pas perdu car on ne peut perdre ce qui ne nous appartient pas. Je nous aie seulement transformé afin que par nos mutuelles essences se développent une souche unique d’inexorables bonheurs.

1 commentaire:

  1. Comme est intéressante cette allégorie chimique ! Tu m'apprends un nouveau mot en plus, "bécher". Je n'avais jamais entendu ça. Merci !
    Toi tu es comme la chimiste du langage qui par ses écrits transforme la réalité crue en une ambroisie délicate.
    Et la suite devient un conte scientifique qui parle de ta résilience devant l'autre qui semble te fuir. J'aime ta force prégnante !
    Je suis tellement heureux que l'autre ne puisse toucher à un cheveu de ton petit chaos personnel. C'est sublime ! TU es sublime !

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